La Mongolie éveille la fascination. Terre lointaine, mémoire des conquérants, et steppe
à perte de vue. Pour comprendre à quoi ressemble Oulan-Bator, prenez un crayon. Dessinez trois carrés emboités.
Au centre, c’est la place Gengis Khan. Le deuxième carré, ce sont des buildings. Dans le troisième, il y a des yourtes et encore des
yourtes.
Pour vous imprégner du passé, de la musique et de l’art mongol, voici les 3 lieux que nous recommandons à votre voyage.
Le Bogd Khan Palace
Mai 1924. Le souverain bouddhiste de la Mongolie, celui qu’on appelle le Bogd Khan, vient de rendre
son dernier souffle. La même année, on proclame l’avènement de la République populaire mongole.
Sur la rive droite de la rivière Selbe, la demeure du roi, traversée par les vents et les pillards, sombre dans l’abandon.
Aujourd’hui, l’espace royal a été converti en musée à ciel ouvert. À l’est, le Palais d’hiver, une vaste bâtisse de style occidental,
se fait l’écrin des richesses préservées du Bogd Khan. Ici, une coiffe spectaculaire imitant les cornes du mouflon. Là, une
yourte d’apparat recouverte des peaux de 150 léopards des neiges.
Côté ouest, c’est le Palais d’été qui occupe la majeure partie de l’enceinte. Une fois passé le seuil, on bascule avec Chihiro
dans un décor digne des studios Ghibli : des cumulus sur du bleu ciel, une pagode couleur rouge passé et, à l’avant-plan, un jardin
laissé en jachère.
Le Palais du Bogd Khan est un lieu étonnant par sa singularité. Le nom même d’Oulan-Bator ("Héros rouge") est un manifeste
contre la monarchie de droit divin. À ce titre-là aussi, le Palais flotte comme un îlot surréel aux portes de la capitale mongole.
Photos : Gwenny NURTANTIO ©
Laissez-vous emporter par Tumen Ekh
"Vous êtes jeune. Vous n’avez pas l’oreille musicale. Vous n’avez aucun sens du rythme.
Ce n’est pas une raison pour vous priver de ça[1]."
Si vous passez à Oulan-Bator, ne vous privez pas d’une soirée au théâtre Tumen Ekh. On le sait, une heure de musique traditionnelle peut vite sembler une éternité à l’oreille profane. La troupe Tumen Ekh le sait aussi. En conséquence de quoi, le spectacle qu’elle a conçu témoigne d’un équilibre remarquable : les artistes se succèdent les uns aux autres pour offrir chants, danses et autres performances sans jamais lasser le public. Une valse de masques sacrés. Deux contorsionnistes à l’aisance déroutante. Du chant diphonique (dont le principe consiste à émettre deux notes en même temps, comme si vous faisiez de la chorale tout seul – on vous laisse vous entrainer).
Photos : Gwenny NURTANTIO ©
Les performances sont placées sous le signe des grands espaces : les danseurs imitent le pas des chevaux, l’archet soutire au
violon un pépiement d’oiseau. Et le musicien fait littéralement hennir son morin khuur (un instrument à corde mongol,
aussi beau qu’une pièce d’échec). Dans le registre "beau à voir", la troupe déploie aussi une large variété de costumes
traditionnels : manches longues et pans de manteaux tournoient sur la scène.
La soirée à Tumen Ekh est tout simplement un régal pour les yeux et les oreilles.
Photos : Gwenny NURTANTIO ©
C’est le Zanabazar !
Enfin, flânez deux bonnes heures au musée des Beaux-Arts de Zanabazar (Fine Art Museum of Zanabazar). Pas besoin de l’audioguide, dont les commentaires se révèlent essentiellement descriptifs. Laissez-vous plutôt guider de salle en salle par les œuvres elles-mêmes.
Aquarelle de U. YADAMSUREN ; Balduu SHARAV, Fête de l’Airag (1912-1913); Grand masque Begtse incrusté de corail || Courtesy: Fine Art Museum of Zanabazar©
La collection du musée Zanabazar offre l’occasion de :
1) Lire des bandes dessinées : avec les toiles de Balduu Sharav, qui dépeint la vie quotidienne avec force anecdotes et dérision.
Un véritable Brueghel mongol à la ligne claire.
2) Utiliser le GPS des dieux : révélation. Les mandalas ne sont pas des coloriages, mais des géographies célestes. Le musée
de Zanabazar possède même un surprenant mandala en 3 dimensions. Sur cette maquette imposante, chaque couleur est associée à un
élément (air, eau,…). Comme au Centre Pompidou, finalement (en effet : les tuyaux, rendus bien visibles, sont peints dans
une couleur spécifiant ce qu’ils véhiculent : air climatisé, eau courante, lignes électriques, etc.).
3) Hésiter : photo ou peinture ? Les portraits exécutés par Balduu Sharav et Sonomsteren ressemblent à des photos recolorisées.
Seul le visage est figé dans un noir et blanc éternisable.
4) Scruter : avec l’œil obsessionnel des œuvres de Chinzorig.
SONOMSTEREN, Tusheet khan Nasantogtokh ; œuvres de CHINZORIG (Renchin-Ochir) ; SONOMSTEREN, Ichinkhorloo || Courtesy: Fine Art Museum of Zanabazar©
Costumes religieux (aquarelles de U. YADAMSUREN) ; Amitaba (dessin iconométrique : lignes de base) || Courtesy: Fine Art Museum of Zanabazar©
Le saviez-vous ?
Le mongol est une des rares langues qui s’écrivent à la verticale. La langue mongole appartient à la même famille
que le finlandais et le coréen. L’eussiez-vous cru ?